lundi 9 juin 2008

Dance with the memory


Originaire d’Afrique du sud, Steven Cohen a eu la chance de ne connaître ce passé de la déportation que tard car ses grands parents ont fui la Shoa et se sont réfugiés en Afrique. Il vit depuis six ans en France, un pays qu’il admire mais dans lequel il a du mal à trouver sa place de par ses multiples étiquettes sexuelles et religieuses. Le spectacle qu’il nous a présenté « Dancing inside out » exprime un côté très personnel de l’artiste. Il mêle son regard personnel sur l’époque de la Guerre, sur lui-même avec l’histoire avec un grand « H ».
Porteur de symboles forts basés sur la religion, la sexualité et l’antisémitisme, le spectacle suscite la réflexion sur soi même, sur le devoir de mémoire mais également sur les rapports humains et ce qu’il y a de plus détestable chez l’homme, le rejet et la ségrégation.
Steven présente une danse paraissant improvisée mais totalement maîtrisée sur fond de sons et d’images d’archives évoquant l’époque douloureuse de l’occupation et de la déportation, il se livre entièrement dans son plus simple pareil. Il soulève plein de tabous qui peuvent avoir rapport à nos propres histoires personnelles. Le rapport à ce corps usé, qui a vécu, donne une image imparfaite de l’être et peut choquer davantage que la nudité.

Un artiste engagé
Paradoxalement, alors que le spectacle est interdit aux moins de 18 ans, Steven lance par son spectacle un appel aux plus jeunes : « Les enfants sont ceux à qui l’on doit s’adresser prioritairement dans le langage violent qui est le leur ».
Choquant, provocateur, le spectacle suscite des interrogations qui, au final, permettent d’apporter une seconde lecture différente de ce que l’on voit sur scène et de nous remettre en cause éventuellement. La vidéo de fond où on le voit ainsi danser dans la cour du centre d’histoire de la résistance de Lyon où il croise enfants et adultes exprime les différences de points de vue que l’on est susceptible d’observer dans un tel spectacle entre adultes, responsables, faisant mine de rien avec une certaine hypocrisie et les enfants qui ont un regard plus ouverts et qui ricanent par l’originalité.
Malgré cette liberté d‘expression semblant totale, il se donne des limites : « J’essaye de ne pas danser, de ne pas intervenir dans les lieux qui ne m’appartiennent pas. Pas dans les églises, plein d’endroits … » précise t-il.
Steven nous surprend jusqu’au bout dans un spectacle exprimant liberté, engagement politique et religieux et choix personnels.

Jérémy Valladon, atelier d'écriture journalistique de Court Toujours

dimanche 8 juin 2008

Monstres et compagnie

Hippotheatron est un spectacle qualifié à la fois de théâtre d’objets et de jeux de marionnettes, une alliance curieuse mais réussie !

Quelques minutes d’attente dans un petit couloir avant que ne s’ouvre la porte et que nous soyons entraînés dans une curieuse foire aux monstres. James Bailey, ancien montreur de phénomènes, nous présente ses monstres, plus suggérés que dévoilés et plus drôles qu’effrayants ! En effet, les personnages sont représentés par… de la vaisselle à l’effigie de la curiosité de ces monstres : l’homme tronc, les sœurs siamoises, les lilliputiens… Un spectacle qui met en scène des objets – marionnettes sur un fond de musique et avec des sous-titrages pour mieux comprendre l’histoire d’amour entre ces monstres, trame de cette représentation.

Julien Mellano use avec justesse de tous ses trucs et astuces, inventions loufoques. On se prend au jeu et on remonte le temps à la rencontre de tous ces phénomènes de foires. Une plongée dans l’inconnu et une atmosphère envoûtante qui plairont aux petits comme aux grands.

Prochaines représentations Hippotheatron

- samedi 7 juin à 20h40 et 22h20

- dimanche 8 juin à 17h30 et 19h20

Stéphanie Delaitre / Atelier d’écriture journalistique de Court Toujours

A chacun son monstre

Quel monstre sommeille en nous ? C’est la question que l’on se pose face au spectacle de Nicolas Bonneau, « Au bonheur des monstres ». Il nous présente une succession d’histoires et de personnages d’apparence ordinaire mais qui ont chacun une zone d’ombre et des pulsions. Ce sont des meurtriers d’un jour. Néanmoins malgré le côté sordide de ces récits, Nicolas Bonneau sait y mettre une touche d’humour et on finit par rire de tous ces meurtres. On compatit, on trouve ces actes justifiés, bref, les monstres de Nicolas Bonneau nous questionnent sur nos propres démons. Bienvenue au parc des petits monstres ordinaires….

Prochaine représentation « Au bonheur des monstres »

Dimanche 8 juin à 17h00 et 18h50

Stéphanie Delaitre / Atelier d’écriture journalistique de Court Toujours

A l'intérieur du secret

Etienne Pommeret met en scène le secret, sa vitalité, tel que l’a écrit Jon Fosse.

Et si l’on vous proposait de voyager au plus profond de l’âme. Vous soupçonneriez l’imposture ? Et vous auriez sûrement raison « …car l’âme, on ne la voit jamais, elle ne se laisse pas voir, c’est comme ça.» Nous voilà donc rassurés : « L’âme, c’est comme ça. » et c’est justement comme ça qu’on l’imaginait depuis longtemps.

Entrez dans « le Sas ». Et comme cette « scène » porte bien son nom, car c’est bien de théâtre dont il est question si l’on se réfère au programme du festival. Imaginez, une petite pièce dont les murs sont couverts de tentures noires. Au centre de ce petit espace, une sorte de boîte, comme une cabine d’essayage, avec un miroir de chaque coté dans lequel se reflète le public. De la musique vous parvient. Les lumières s’éteignent progressivement, laissant apparaître un homme, derrière le miroir… sans tain : « Le plus important n’est pas de se souvenir, mais d’oublier.» Un homme, va nous emmener au plus intime de l’âme, nous voilà pris dans l’engrenage de ses pensées. Le regard de Jean-Pierre Berthomier est intense et captivant. Ces questions qu’ils se posent deviennent nôtres. Il tourne sur lui-même comme notre réflexion fascinée. « Ce qui est compris n’existe pas, sauf en tant que chose comprise » Vivre dans le secret nous montre un homme qui se pose des questions et qui tente de leurs apporter des éléments de réponse, devant nous, avec nous. « Qu’on me laisse vivre dans le secret. »

On en oublierait presque d’applaudir, déconcertés.

7 minutes pour se remuer les méninges. Attention ! 15 personnes par séances seulement !

Samedi 7 –19h30/21h30/23h dans le SAS. Boucle de 7min.

AméLie. Atelier d'écriture journalistique de Court Toujours

Que Brad nous vienne en aide!

La lecture de la pièce de Christian Lollike, auteur danois, nous emmène du côté de la « pop politique ». Un monde où Brad Pitt est le héros, et vient sauver le monde des catastrophes écologiques et des problèmes sociaux. Le monde vu comme un scénario de film catastrophe, façonné à l’américaine. Les trois interprètes sur scène se partagent le rôle du bienfaiteur. Les ambiances s’enchaînent, une Garden party organisée par Angelina J, le tournage d’un film où Brad n’est autre que travailleur sur les chantiers de démantèlement, une discussion entre l’ancien héros et sa petite fille. On passe d’un présent où ils savaient, où ils voulaient agir, rongés par la culpabilité de ne rien faire « Punis-moi de ne pas agir ! » à un futur où les reportages télévisés diffusent la désintégration des hommes sous les pluies acides. Et la question de la petite-fille à Brad : « vous ne saviez pas, pourquoi vous n’avez rien fait ? ».

Cette lecture, habilement menée par les quatre comédiens nous dévoilent toute l’ironie de l’auteur, face à ce Charity Business. Les tics de Brad repris subtilement, les paroles tendres d’Angelina « embrasse-moi », tout cela mêlé aux propos sur l’écologie et comment sauver le monde. Mais n’oublions pas l’amour, présent du début à la fin car tout est bien qui finit bien quand Brad est le héros, « ils s’aimèrent jusqu’à la fin des temps ». Rendre à cette pièce tout son propos sans le caricaturer, ni le dénaturer, c’est le parti brièvement et sobrement relevé par cette lecture.

Si vous avez loupé la séance proposée par le festival, vous pouvez toujours vous faire votre propre lecture de l’œuvre.

Julie Sicot, atelier d'écriture journalistique de Court Toujours